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  • Photo du rédacteurlaetitiaam

Quand les femmes redoutent de partir en congé maternité

Chronique publiée dans le journal Le Temps le 26 février 2021.


Le congé maternité représente une longue rupture avec le milieu professionnel et peut être source d’inquiétudes pour les femmes. Peur de perdre leur poste ou de se voir privées de leurs responsabilités, les futures mamans font parfois face à trop d’incertitudes



Entré en vigueur en 2005, le congé maternité suisse répond à des besoins socioéconomiques et de santé publique. Un rapport de la Commission fédérale de coordination pour les questions familiales* le décrit comme un soutien individuel et sociétal, permettant de démarrer une vie de famille en préservant la santé physique et mentale des femmes. Contribuant ainsi à les maintenir actives professionnellement dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre qualifiée en Suisse.

Toutefois cette expérience quasi unique de césure avec le travail est parfois perçue comme un frein dans une carrière et certaines futures mamans la redoutent.


Voici l’exemple de Marine, jeune femme en ascension de carrière au moment où elle attend son premier enfant. Confiante, elle envisage, sans aucune ambiguïté, de revenir au travail à temps plein dès la fin de son congé maternité légal. Elle compte ainsi poursuivre ses objectifs professionnels mais se voit rapidement mise à l’écart. «J’ai dû insister pour convaincre mon manager, qui me proposait d’emblée de réduire mon taux d’activité. C’est très frustrant et culpabilisant de se voir imposer un rôle maternel par des hommes dont les épouses restent à la maison», explique la jeune femme avec regret.


«On a toute cette petite peur au fond de nous»


Anna, qui travaille dans un milieu principalement masculin, pense que la crainte du congé maternité est commune à beaucoup de femmes. «On a toutes cette petite peur au fond de nous, explique-t-elle. Quand on laisse une place convoitée, on sait qu’elle peut être prise», raconte cette jeune maman retournée au travail à temps plein après les 16 semaines postnatales.


Le remplacement d’un poste est un challenge technique et humain qui omet trop souvent de se soucier de la personne remplacée et des futures mamans en particulier. Lorsqu’elles sont assaillies par la gestion de leur bébé et la fatigue du post-partum, les mères se distancient du travail, et cela au bénéfice de leur famille et de leur santé. Mais l’entreprise est un milieu mouvant qui ne cesse de se réorganiser, et une longue absence peut jouer en leur défaveur. Avant leur accouchement, Marine et Anna sont remplacées respectivement par un homme plus senior et par un jeune collègue dont la disponibilité professionnelle est sans limite. Voilà de quoi inquiéter nos deux futures mamans qui décrivent l’angoisse de perdre un poste pour lequel elles se sont battues.


Puis, de retour au travail, Marine peine à retrouver sa place et elle comprend progressivement qu’elle ne peut pas reprendre les dossiers qu’elle juge intéressants. S’ensuivra quelques mois plus tard une promotion de son remplaçant, qui deviendra son manager. Anna, elle, se voit privée de ses contrats les plus rentables et son salaire sera ainsi divisé par deux.


La promotion des hommes


Si les deux jeunes femmes ont vu leurs aspirations professionnelles s’envoler durant cette période, le mari de l’une a été promu! Marine raconte la bonne nouvelle au goût amer qui rappelle l’immuable condition des femmes lorsqu’elles deviennent mères et le frein que peut représenter une maternité dans une carrière. Démotivée par cette expérience, elle a trouvé aujourd’hui un nouvel employeur.


Encore trop de femmes craignent de partir en congé maternité alors qu’on devrait leur donner confiance lorsqu’elles donnent naissance. Il est capital d’encadrer loyalement le remplacement des mères et de les rassurer. Il faut considérer les enjeux d’influence entre collaborateurs qui continuent de s’exercer lorsque les mères sont auprès de leur bébé et reconnaître que l’arrivée d’un remplaçant dans une équipe peut représenter un risque pour le poste d’une femme qui part en congé maternité. Il est du rôle du manager et des équipes de ressources humaines de mettre en place un cadre éthique pour conserver les talents dans l’entreprise et donner l’exemple aux jeunes femmes qu’on peut concilier carrière et maternité.


* Connaissances scientifiquement fondées sur les effets du congé parental, du congé maternité et du congé paternité, Commission fédérale de coordination pour les questions familiales (COFF), Département fédéral de l’intérieur, 2017.





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